Une journée ordinaire...

C’était une journée fort ordinaire à la cathédrale. Enfin, une matinée bien ordinaire. Les ailes bien écarquillées, le menton bien à plat sur un oreiller, l’ange, malgré le fait qu’elle s’était habillé plus tôt et avait même déjeuné, était de retour dans son lit, pensive, bien que ses pensées étaient totalement dépourvue de sens, de logique, ou de quoi que ce soit d’autre que des images.

D’un geste lent et paresseux, elle replaça ses lunettes car elle les sentait glisser peu à peu depuis les dernières minutes et trouva enfin la force de se lever. Une légère marche dans la cathédrale lui ferait le plus grand bien.

Il était tard dans la matinée; les anges couraient, ou volaient, déjà d’un bout à l’autre des couloirs un peu plus loin. Contrairement à son habituelle volonté, l’archange se sentait dépourvu de celle-ci.

À peine quelques minutes de marche et elle en avait assez. Tout près d’elle, un balcon avec 2-3 chaises et une table, un endroit parfait pour laisser libre court à sa paresse.

En moins de dix secondes, ses fesses étaient posées sur une chaise, son bras droit pointé vers le ciel, son menton posté au bout de celui-ci et sa main gauche clapotait des aires mélancoliques.

C'était une belle journée aujourd'hui et Alexiel en était ravi. Les vitraux de la Cathédrâle étaient illuminés par le soleil étincelant, il arrivait même que l'archange en était presque aveuglé. Le pas léger, les cheveux soigneusement peigné vers l'arrière, Alexiel partait à la rencontre de son amie de longue date, Lehas.
- J'espère qu'elle n'est pas encore entrain de poireauter dans son lit!

Sur ce, quelques instants après, Alexiel arriva en arrière de celle-ci.
- Bon matiiiiin ma douce amieeee ! Lança-t'il, en étirant ses syllabes.
J'ai remarqué que tu n'avais pas l'air très motivée aujourd'hui, qu'est-ce que je peux faire pour contrer cela ?

Étrangement, se faire surprendre par Alexiel aujourd’hui la fit sursauter, contrairement aux fois précédentes où il surprenait l’archange de la même manière.

-Bonjour Alexiel.

Évidemment, elle s’attendait à ce que son ami, toujours très joyeux, s’inquiète de son humeur, mais ça la touchait encore à chaque fois.

-Oh ce n’est rien, probablement une phase ou bien simplement un peu de fatigue. Ça ira mieux d’ici une heure au maximum, ne t’en fais pas. Tu sais comme je suis depuis le temps qu’on se connaît.

Elle repoussa légèrement sa chaise, faisant bien attention de ne pas heurter Alexiel avec, et se redressa. L’archange se dirigea vers l’intérieur et se retourna près du cadre de porte.

-Allez, viens. Te voir m’a redonner envie de marcher et en plus, ta compagnie me fera le plus grand bien.

Son amie Lehas rassura Alexiel de son état. Il en était ravi et le démontra par un énorme sourire. L'archange prit soin de rester près de son amie, comme toujours. Une petite promenade sous le soleil ferait le plus grand bien, le boulot d'archange n'était pas de tout repos. Certains combats laissent des cicatrices psychologiques irréversibles...
Alexiel devint un peu plus sérieux l'espace d'un moment:
- Quelque chose te trouble Lehas ? Tu ne peux rien me cacher tu sais...
L'homme regardait droit devant lui, tel un allure de soldat. Son regard avait une impression de mélancolie.

Alexiel et Lehas avaient le même âge et pratiquement le même passé. Ils ont vécu des drames, des tragédies. Pourtant, ils sont toujours là, à se battre pour la justice et l'amour. N'empêche que les souvenirs brûlants du passé peuvent revenir en rêve...
- Tu as mal dormi ?

Le soleil la réchauffait peu à peu et, agrémenté de la compagnie de son ami de longue date, son humeur, elle le savait, se rétablirait rapidement. Puis, sans qu’elle n’ait rien dit, Alexiel mit le doigt sur ce qui n’allait pas. De nouveau, les événements d’un autre siècle étaient venus la hanter pendant son sommeil, mais peu importe le nombre de fois où elle revoyait ces scènes, ça l’affectait toujours autant.

-Tu as raison, je ne peux vraiment rien ton cacher.

L’expression de Lehas se contorsionna l’espace d’un battement de cœur puis reprit son allure naturelle.

-C’est simple, et je le sais. Je suis passé par-dessus leur mort et ce qui en découle, mais lui me hante toujours.

Elle prit une grande respiration et la retînt longuement avant de la relâcher en un bref soupir. Ce n’était plus le fait qu’il lui avait enlevé sa famille, ce qui la dérangeait maintenant c’était de ne pas savoir si un jour elle aurait sa revanche, si un jour elle pourrait regarder leur tombes et dire ‘J’ai réussi.’

-Peu importe, ce n’est rien. Je suis plus forte que tout ça, je le sais.

Et ça y était, elle le sentait. Elle avait dit les mots juste qui pouvaient toujours lui redonner le moral, peu importe la situation et ça la soulageait énormément.

Alexiel lui tendit un sourire.
- Oui, je le sais Lehas. Mais tu sais, moi aussi je ressens ce sentiment, seulement, je le dissimule mieux que toi on dirait !
Il tapota amicalement du coude le bras de son amie.

Puis, un silence s'installa, c'était paisible et on entendait le bruit de la vie à pleine intensité ; les oiseaux qui sifflent, les enfants qui jouent, le vent souffler... Tout était vraiment parfait. Puis, Alexiel, remarquait pour toute la première fois la beautée qu'émanait Lehas. Sa robe, d'un blanc cassé, venait épouser ses formes parfaitement. Ses petites lunettes venait se reposer sur son nez légèrement retroussé. L'archange se sentit mal à l'aise l'espace d'un moment.

Elle savait bien que c’était une question rhétorique, mais une réponse se formait déjà dans sa tête, et celle-ci ne lui plaisait pas. Oui elle était plus forte que ce qu’elle montrait en ce moment, oui elle pouvait mettre ces événements similaires à ceux de son ami de côté et oui il vivait beaucoup plus aisément avec ça qu’elle. L’archange n’en était, bien heureusement, pas jalouse. Tout le contraire en fait.

Le silence qui suivit lui fit le plus grand bien, car dans ce petit laps de temps, elle retrouva enfin son humeur habituelle; sérieuse, mais détendue et une vision positive des choses.

Ensuite, l’archange sentit les yeux de son ami posé sur elle et, du coin de l’œil, elle nota qu’il était, très brièvement, mal à l’aise. L’expression retira même de la bouche de l’archange un rire léger, mais vrai.

- Qu’y a-t-il? Il est rare de voir le malaise sur ton visage, tombeur de ses dames!

Après l'intervention de Lehas, il était évident qu'il se ressaisisse, où qu'il soit honnête ? Sa peau avait une légère teinte rosé, même un tombeur comme lui pouvait être timide ! Il regardait vers le haut, puis se lança; se surprenant lui-même, l'archange avait plus d'assurance qu'il ne le pensait:
- J'étais entrain de me dire que tu étais très jolie...

Il prit un temps. Alexiel eut un sourire imprévisible de sa part, il rit.
- ...Ah que je suis con. Tapes-moi !
Il rit de plus belle, tout en se passant une main dans les cheveux. Alexiel avait envie de se sentiment de vengeance, il avait les mêmes craintes que Lehas à ce sujet, et il tenait à le mettre en oeuvre. Seulement, il ne savait où commençer.

Venait-il juste de le dire réellement, ou était-ce seulement son imagination? Non, elle n’imaginerait jamais une phrase comme celle-là. D’accord, les deux étaient amis depuis très longtemps, mais c’était justement là le point. Ils se connaissaient depuis très longtemps. Elle sait comment il agit, et Alexiel était atteint de ‘draguerie’ compulsive, donc il n’avait qu’été lui-même, comme toujours. Seulement cette fois, c’était dirigé sur elle et c’était étrange, mais ça la fit quand même sourire.

-Oh, ne t’en fait donc pas avec ça; je suis habitué de t’entendre à la longue, quoique je dois dire que tu me déstabilise un peu en ce moment. Enfin, ce n’est pas une raison pour te taper.

Elle s’arrêta devant une large fenêtre ouverte et s’accota sur le rebord. Ses yeux descendirent lentement, très lentement, vers le bas de la cathédral où des enfants s’amusaient avec ce qui semblaient être des branches de bois.

-Tout à l’air si simple en les regardant…

Les deux amis étaient toujours entrain de se balader dans point d'arrivée particulier. Alexiel avait entendu ce que Lehas venait de lui dire.
Il décida de s'arrêter ferme, tout en prenant une respiration.

Brusquement, il mis fermement ses deux mains sur chacune des épaules de Lehas. Ses yeux étaient rivés sur la jeune femme. Alexiel avait l'air étrangement trop sérieux.
- Lehas, partons tout les deux retrouver celui à l'origine de notre malheur. Amenons-lui sa défaite, et nous serons soulagés pour le reste de notre existence. Je ne pourrais partir sans toi, car ensemble, nous formons une force inégale ! Alors ma chère, qu'en dis-tu ? Entraînons-nous et préparons nous et d'ici quelques semaines, nous partirons sur le chemin des Enfers !